hLES COREENNES : FESTIVAL D'AVIGNON
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FESTIVAL
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AVIGNON, FRANCE
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1998
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1- Message du Président de la République de Corée
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2- Pourquoi les Coréennes ?
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3- Présentation de la Fondation Samsung de la Culture
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4- Nouer la tradition avec la modernité : intentions du directeur artistique
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5- A la découverte de la musique coréenne traditionnelle
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6-La danse coréenne
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7- La danse bouddhique de YI Mae-bang
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8- Le P'ansori d'AN Sook-sun
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9- Le Saengsobyungju et le Suryounguhm
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10-Le solo de daegum et le Chungsunggok
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11- Kagok et le Taepyungga (hymne à la paix)
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12- Chunaengmu ( Chant du rossignol au printemps )
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13- Sujechon
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14-Institut National Coréen de Musique et de Danse Traditionnelles
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15- KIM Myung-ja et le Salpurichum
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16- Le shinawi
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17-KIM Duk-soo et son ensemble Samulnori - Hanullim
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18- Yook Tae-ahn / Subyok-tchiki, art martial
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19- Artistes et Installations artistiques
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20- Artistes et Danse et Musique
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21- Réalisation de la brochure










[ 5 ] A la découverte de la musique coréenne traditionnelle


HAHN Myung-hee
Directeur de l'Institut National Coréen de Musique et de Danse Traditionnelles

La musique traditionnelle de Corée, d'origine millénaire, est originale aussi bien sur le plan musical que culturel. Elle s'est, dans un premier temps, propagée en Chine et au japon avant de revenir, enrichie, en Corée. Vers la fin du 20ème siècle, la musique occidentale afflue massivement et s'impose, du moins en quantité, aux dépens de la musique traditionnelle. Les documents historiques attestent que, en matière de musique, les échanges ont été constants entre la Corée et ses voisins. La musique coréenne s'est enrichie d'emprunts étrangers tout en gardant ce qu'elle avait de spécifiquement coréen. Il en va de même avec la musique occidentale, au contact de laquelle la musique traditionnelle continue de s'enrichir.

Pour bien comprendre la musique traditionnelle, il faut distinguer clairement ses deux grandes orientations : la musique de cour et la musique populaire. La première était réservée à l'élite (elle correspondrait en Occident à la musique classique), tandis que la seconde, pratiquée par le peuple, correspondrait à ce qu'on appelle musique populaire ou folklorique.

La musique de cour s'adresse, pourrait-on dire, plutôt à l'esprit, tandis que la musique populaire parlerait plutôt au coeur. La première est spirituelle, réfléchie, calme, tandis que la seconde est extériorisée, vivante, exubérante et veut susciter un plaisir spontané. Pour reprendre une terminologie occidentale, on peut dire que la musique de cour est plus classique, la populaire, plus romantique. Dans la première catégorie, mentionnons le sujechon (musique symphonique jouée dans les cérémonies officielles) le yongsanhoesang (chant à la gloire de Bouddha) et les mélodies lyriques. Appartenant à la deuxième catégorie, citons le sanjo (solo de flûte ou de kayagum ou d'autre instrument), le samulnori (musique paysanne sur instruments à percussion) et le p'ansori (drame chanté à une seule voix).

Il est bien naturel que la musique, dans ses caractéristiques, soit étroitement liée à son contexte historique et culturel. La musique de cour, par exemple, est très lente, avec des intervalles qui peuvent aller jusqu'à trois secondes. Si en Occident, le tempo est basé d'abord sur le pouls cardiaque, en Corée il se fonde essentiellement sur le rythme de la respiration. En Occident, on dit de quelqu'un, qu'il est mort quand son coeur a cessé de battre, alors qu'en Corée, on le dit quand la personne a cessé de respirer. Preuve que la respiration a un rôle capital, ne dit-on pas que, pour se calmer quand on est irrité, il faut respirer profondément ? Ou encore qu'il faut porter toute son attention à la respiration, dans le cadre de l'ascèse Zen, pour améliorer sa santé ou se purifier l'esprit ? Si la musique occidentale est gaie, dynamique (caractéristiques liées au rythme cardiaque), la musique coréenne est calme, raffinée, pensive : elle emprunte son caractère paisible à la respiration.
La musique officielle ou rituelle montre aussi à quel point elle est liée au contexte et à la culture. Les instruments, ici, mais aussi les compositions, reflètent très exactement la représentation du monde partagé entre yin et yang. Ecouter cette musique sans connaître ce qu'elle contient de représentation du monde, c'est courir le risque de se tromper.

Venons-en maintenant à la musique populaire. Une de ses plus grandes caractéristiques, c'est l'improvisation. À notre époque, la musique se transmet par des partitions, ce qui en fixe la forme. Auparavant, quand il n'y avait pas de partitions, elle était moins figée, changeant au gré des interprètes et des moments de l'interprétation. Les Coréens sont particulièrement doués pour l'improvisation ; ils sont plus sentimentaux qu'intellectuels, se laissant volontiers prendre au rythme de la pièce jouée. Cette musique populaire peut être interprétée librement sans avoir à respecter- scrupuleusement une forme première. Le samulnori est un bon exemple de cette liberté : la musique est gaie, dynamique et l'improvisation peut y trouver une grande place.

On peut dire, en conclusion, que la musique coréenne traditionnelle est inséparable de la culture qui l'a vue naître. Il serait difficile de l'apprécier sans faire l'effort de comprendre la culture traditionnelle. Si on aborde cette musique l'esprit curieux, en abandonnant tous préjugés, on sera à même d'en découvrir les beautés cachées.